Tri Yann - © E. Doll
Interview à trois voix avec les figures de proue de la musique bretonne, avant leur concert parisien de l’Alhambra les 4 et 5 octobre prochains, qui célèbre leur 45 ans de carrière.
A la sortie de l’album en mai dernier, la pochette de « La Belle Enchantée » avait subi la censure de la part des plateformes de téléchargement, pouvez-vous nous en dire plus ?
Jean-Louis Jossic : Effectivement, c’est toujours un peu surprenant. Un peu après la sortie de l’album, la maison de disque digitale Believe nous a priés de rhabiller d’un costume de bain rayé La Belle enchantée qui apparaissait dénudée de dos sur la pochette, craignant une censure pudibonde des plateformes de téléchargement américaines. Nous avions en effet choisi un dessin du peintre et sculpteur français Georges Lacombe (1868-1916) représentant un couple allongé. Ainsi est épargné à la vue des Internautes le «gribouillis pornographique» d'un compagnon de Gauguin à Pont Aven». Les autres pourront se rincer l’œil en achetant l’album chez leur bon vieux disquaire…
© D. Raynal
Comment nait un album des Tri Yann ?
Jean-Paul Corbineau : Les mélodies sélectionnées donnent souvent à Jean-Louis (Jossic) l’idée du texte qu’il va écrire et plus généralement l’ambiance qu’il va donner à la chanson. C’est là qu’interviennent dans le groupe ceux qui sont doués pour les arrangements. Le plus étonnant lorsque l’on écoute la musique de Tri Yann, c’est que nous entendons naturellement des mélodies bretonnes ou celtes, alors que c’est nous qui les avons pour la plupart composées.
Jean Chocun : A travers nos disques, nous essayons de préparer des programmes pour la scène qui se suivent depuis 45 ans. Nous nous sommes donc mis au boulot et chacun a apporté ses idées. Au final, le thème qui s’est détaché portait plutôt sur les légendes, mais sans que cela soit complètement déterminé. Ensuite, chacun a apporté sa pierre à l’édifice, c’est-à-dire ses mélodies. Et nous avons fait comme à chaque fois, un tri entre 50 ou 60 idées, des uns et des autres. Les propositions musicales entrainent ensuite des images pour les paroles. Une fois que les paroles sont plus ou moins ébauchées, que le thème est plus ou moins défini, cela redonne d’autres idées pour faire d’autres mélodies. Tout cela se secoue et finit par se mettre en place au bout d’un certain temps. Cela n’exclut pas qu’un titre travaillé pendant des semaines ou des mois soit au bout du compte éliminé ou qu’un autre arrive en cours de route.
Jean-Paul Corbineau : Les mélodies sélectionnées donnent souvent à Jean-Louis (Jossic) l’idée du texte qu’il va écrire et plus généralement l’ambiance qu’il va donner à la chanson. C’est là qu’interviennent dans le groupe ceux qui sont doués pour les arrangements. Le plus étonnant lorsque l’on écoute la musique de Tri Yann, c’est que nous entendons naturellement des mélodies bretonnes ou celtes, alors que c’est nous qui les avons pour la plupart composées.
Jean Chocun : A travers nos disques, nous essayons de préparer des programmes pour la scène qui se suivent depuis 45 ans. Nous nous sommes donc mis au boulot et chacun a apporté ses idées. Au final, le thème qui s’est détaché portait plutôt sur les légendes, mais sans que cela soit complètement déterminé. Ensuite, chacun a apporté sa pierre à l’édifice, c’est-à-dire ses mélodies. Et nous avons fait comme à chaque fois, un tri entre 50 ou 60 idées, des uns et des autres. Les propositions musicales entrainent ensuite des images pour les paroles. Une fois que les paroles sont plus ou moins ébauchées, que le thème est plus ou moins défini, cela redonne d’autres idées pour faire d’autres mélodies. Tout cela se secoue et finit par se mettre en place au bout d’un certain temps. Cela n’exclut pas qu’un titre travaillé pendant des semaines ou des mois soit au bout du compte éliminé ou qu’un autre arrive en cours de route.
Pourquoi ce titre « La Belle enchantée » ?
Jean-Louis Jossic : En fait, ce n’était pas le titre qui était prévu au départ. Nous voulions appeler cet album la « Femme squelette » qui s’inspire d’un conte inuit. Jean (Chocun) m’a fait remarquer que la femme squelette n’était peut-être pas très vendeur. Cela faisait un peu anorexique. Je voulais tout de même qu’il reste une trace de la femme squelette. Le morceau s’appelle donc La Belle enchantée ou la Femme squelette.
Le voyage et les découvertes sont également très présents avec notamment votre titre Les Six couleurs du monde ?
Jean-Louis Jossic : La première fois que j’ai véritablement abordé la notion d’ailleurs et de voyage, c’est lors de ma rencontre avec le journaliste Morvan Lebesque qui avait écrit dans les années soixante-dix un ouvrage fondateur intitulé « Comment peut-on être breton ? ». Lors d’une dédicace du côté de Nantes, il m’a expliqué que l’une des caractéristiques du peuple celte est d’être profondément voyageur, mais il est tellement attaché à sa terre, qu’il faut qu’à un moment ou un autre il y retourne. Paradoxalement, ce phénomène pousse les Celtes à ne pas être des voyageurs du réel, mais très souvent des voyageurs de l’imaginaire. Morvan Lebesque me citait alors Chateaubriand ou Jules Verne qui faisait des voyages dans les revues scientifiques. A côté de cela, il y a des Tabarly, Kersauson ou Desjoyeaux…
Jean-Louis Jossic : En fait, ce n’était pas le titre qui était prévu au départ. Nous voulions appeler cet album la « Femme squelette » qui s’inspire d’un conte inuit. Jean (Chocun) m’a fait remarquer que la femme squelette n’était peut-être pas très vendeur. Cela faisait un peu anorexique. Je voulais tout de même qu’il reste une trace de la femme squelette. Le morceau s’appelle donc La Belle enchantée ou la Femme squelette.
Le voyage et les découvertes sont également très présents avec notamment votre titre Les Six couleurs du monde ?
Jean-Louis Jossic : La première fois que j’ai véritablement abordé la notion d’ailleurs et de voyage, c’est lors de ma rencontre avec le journaliste Morvan Lebesque qui avait écrit dans les années soixante-dix un ouvrage fondateur intitulé « Comment peut-on être breton ? ». Lors d’une dédicace du côté de Nantes, il m’a expliqué que l’une des caractéristiques du peuple celte est d’être profondément voyageur, mais il est tellement attaché à sa terre, qu’il faut qu’à un moment ou un autre il y retourne. Paradoxalement, ce phénomène pousse les Celtes à ne pas être des voyageurs du réel, mais très souvent des voyageurs de l’imaginaire. Morvan Lebesque me citait alors Chateaubriand ou Jules Verne qui faisait des voyages dans les revues scientifiques. A côté de cela, il y a des Tabarly, Kersauson ou Desjoyeaux…
A l'Olympia - © D. Raynal
Sur 12 titres, vous signez 11 compositions et un traditionnel Sant Efflam hag ar Roué Arzur qui s’inspire du Barzaz Breiz (la matière de Bretagne). Pouvez-vous nous en dire plus sur l’adaptation de ce titre qui fait appel aux deux voix féminines de Kohann et Clarisse Lavanant ?
Jean-Louis Jossic : Sant Efflam fait 37 couplets. Paul Lamirault en avait retenu quatre qui sont plutôt des couplets religieux et qui personnellement ne me plaisaient pas beaucoup parce que je trouve que l’histoire de Saint Efflam assez craignos ! C’est un ermite en Irlande qui rencontre une princesse très belle et qui décide de l’épouser. La nuit de noce se passe et il abandonne la fille. Le lendemain, ils se retrouvent et il décide de son propre chef de devenir moine. Mais il est très gentil. Il dit à la fille si tu veux, tu peux venir avec moi au convent et on partira tous les deux vers le bon Jésus… A côté de cela, il y a à la fin de ce chant l’évocation d’un combat. Saint Efflam, lorsqu’il est devient un Saint revient dans la petite Bretagne. Il débarque à Lannion et voit le roi Arthur qui est en train de foutre une tannée à des dragons qui emmerdent le pays. Et là, il fait un miracle. Il tape avec sa crosse sur un rocher, jaillit une fontaine miraculeuse ou de la bière on ne sait pas trop…Le roi Arthur boit sont bock, repart au combat et tue les dragons. Nous avons trouvé que ce passage-là était beaucoup plus intéressant, surtout sur une musique de cantique. L’arrangement de Lamirault est très beau. Nous en avons un chant choral à quatre voix mixtes. Nous avons voulu le faire avec Kohann et Clarisse Lavanant pour justement avoir des voix de femmes avec des tessitures que nous ne sommes pas capables de faire.
Jean-Louis Jossic : Sant Efflam fait 37 couplets. Paul Lamirault en avait retenu quatre qui sont plutôt des couplets religieux et qui personnellement ne me plaisaient pas beaucoup parce que je trouve que l’histoire de Saint Efflam assez craignos ! C’est un ermite en Irlande qui rencontre une princesse très belle et qui décide de l’épouser. La nuit de noce se passe et il abandonne la fille. Le lendemain, ils se retrouvent et il décide de son propre chef de devenir moine. Mais il est très gentil. Il dit à la fille si tu veux, tu peux venir avec moi au convent et on partira tous les deux vers le bon Jésus… A côté de cela, il y a à la fin de ce chant l’évocation d’un combat. Saint Efflam, lorsqu’il est devient un Saint revient dans la petite Bretagne. Il débarque à Lannion et voit le roi Arthur qui est en train de foutre une tannée à des dragons qui emmerdent le pays. Et là, il fait un miracle. Il tape avec sa crosse sur un rocher, jaillit une fontaine miraculeuse ou de la bière on ne sait pas trop…Le roi Arthur boit sont bock, repart au combat et tue les dragons. Nous avons trouvé que ce passage-là était beaucoup plus intéressant, surtout sur une musique de cantique. L’arrangement de Lamirault est très beau. Nous en avons un chant choral à quatre voix mixtes. Nous avons voulu le faire avec Kohann et Clarisse Lavanant pour justement avoir des voix de femmes avec des tessitures que nous ne sommes pas capables de faire.
Tri Yann - © E.Doll
Vous fêtez cette année vos 45 ans de carrière, ce qui est un record pour un groupe français. Quel est le secret de votre longévité ?
Jean-Paul Corbineau : Le secret tient certainement au fait que nous sommes avant tout trois potes. Je chantais déjà avec Jean (Chocun) avant que nous rencontrions Jean-Louis (Jossic) qui faisait à cette époque du théâtre. Nous sommes des amis, donc forcément, on se connait bien et cela facilite les choses pour passer au-dessus des difficultés. Nous savons aussi jusqu’où il ne faut pas trop aller. Il y a également une autre raison, c’est notre passion commune pour la scène et la rencontre. Tri Yann n’existerait pas sans la scène. Le public dit d’ailleurs, on a vu les Tri Yann avant même de dire, on les a entendus. Nous avons aussi la chance d’avoir encore des idées et d’être en bonne santé : pourvu que cela dure !
Les 4 et 5 Octobre 2016, vous irez fêtez les 45 ans de Tri Yann, à L'Alhambra à Paris. Qu’avez-vous concocté pour votre public, les « Trianautes » ?
Jean-Louis Jossic : C’est vrai que notre public s’appelle comme cela, ce qui est plutôt poétique…Notre album s’intéresse aux légendes, aux contes, et par conséquent aux veillées. Dans nos spectacles, nous invitons désormais le public à monter sur la scène. Nous essayons d’apporter la convivialité de la veillée, non plus à dix devant la cheminée, mais à 500, 1000 ou 2000 personnes dans la lumière et les décibels. L’origine de tout cela remonte pour moi à un concert de Joan Baez à l’Olympia en 1973. La scène était pleine de comme un œuf. C’était tellement bondé qu’ils ont mis 150 personnes sur scène autour d’elle. C’était admirable.
Jean-Paul Corbineau : Le secret tient certainement au fait que nous sommes avant tout trois potes. Je chantais déjà avec Jean (Chocun) avant que nous rencontrions Jean-Louis (Jossic) qui faisait à cette époque du théâtre. Nous sommes des amis, donc forcément, on se connait bien et cela facilite les choses pour passer au-dessus des difficultés. Nous savons aussi jusqu’où il ne faut pas trop aller. Il y a également une autre raison, c’est notre passion commune pour la scène et la rencontre. Tri Yann n’existerait pas sans la scène. Le public dit d’ailleurs, on a vu les Tri Yann avant même de dire, on les a entendus. Nous avons aussi la chance d’avoir encore des idées et d’être en bonne santé : pourvu que cela dure !
Les 4 et 5 Octobre 2016, vous irez fêtez les 45 ans de Tri Yann, à L'Alhambra à Paris. Qu’avez-vous concocté pour votre public, les « Trianautes » ?
Jean-Louis Jossic : C’est vrai que notre public s’appelle comme cela, ce qui est plutôt poétique…Notre album s’intéresse aux légendes, aux contes, et par conséquent aux veillées. Dans nos spectacles, nous invitons désormais le public à monter sur la scène. Nous essayons d’apporter la convivialité de la veillée, non plus à dix devant la cheminée, mais à 500, 1000 ou 2000 personnes dans la lumière et les décibels. L’origine de tout cela remonte pour moi à un concert de Joan Baez à l’Olympia en 1973. La scène était pleine de comme un œuf. C’était tellement bondé qu’ils ont mis 150 personnes sur scène autour d’elle. C’était admirable.
© D. Raynal
Quels nouveaux costumes allez-vous arborez sur scène ?
Jean-Louis Jossic : Depuis de nombreuses années nous apportons un soin particulier à nos costumes qui sont d’inspiration bretonne et baroque. Nous sommes d’ailleurs le seul pays en Europe qui ne comprend pas le mot baroque souvent confondu avec le rococo ou le kitsch. Le baroque, ce sont tous les contraires qui se croisent. C’est l’exubérance, la créativité, le dépassement de soi. Sur scène, nous déclinons cet esprit baroque dans nos costumes en faisant appel aux légendes et aux différentes saisons qui ont toujours ponctué la vie des Bretons.
Jean-Louis Jossic : Depuis de nombreuses années nous apportons un soin particulier à nos costumes qui sont d’inspiration bretonne et baroque. Nous sommes d’ailleurs le seul pays en Europe qui ne comprend pas le mot baroque souvent confondu avec le rococo ou le kitsch. Le baroque, ce sont tous les contraires qui se croisent. C’est l’exubérance, la créativité, le dépassement de soi. Sur scène, nous déclinons cet esprit baroque dans nos costumes en faisant appel aux légendes et aux différentes saisons qui ont toujours ponctué la vie des Bretons.
© D. Raynal
Après ce nouvel album et cette tournée, faudra-t-il attendre les 50 ans du groupe pour vous retrouver sur scène ?
Jean Chocun : Nous aurons dans ce laps de temps au minimum un disque en cogitation. Il y a en ce moment la scène et comme les choses se font petit à petit, nous avons toujours des évènements impromptus qui nous arrivent. Nous venons par exemple de nous réapproprier grâce à Conan Mevel un titre plus ancien qui s’appelle An Tourter. Ce titre n’était plus dans notre tour de chant depuis au moins 10 ans.
Jean-Paul Corbineau : Dans cet album, nous essayons de tenir en haleine notre public de la première à la dernière note ou parole. Nous racontons en chantant, nous chantons en racontant. C’est d’abord un récit qu’il faut le faire passer du début à la fin. En ce qui me concerne, cela a été pour moi une difficulté supplémentaire. Et puis avec des copains derrière la vitre lors de l’enregistrement, ce n’est pas le public le plus facile. Je dirais même que c’est le plus exigeant.
Propos recueillis par David RAYNAL
Jean Chocun : Nous aurons dans ce laps de temps au minimum un disque en cogitation. Il y a en ce moment la scène et comme les choses se font petit à petit, nous avons toujours des évènements impromptus qui nous arrivent. Nous venons par exemple de nous réapproprier grâce à Conan Mevel un titre plus ancien qui s’appelle An Tourter. Ce titre n’était plus dans notre tour de chant depuis au moins 10 ans.
Jean-Paul Corbineau : Dans cet album, nous essayons de tenir en haleine notre public de la première à la dernière note ou parole. Nous racontons en chantant, nous chantons en racontant. C’est d’abord un récit qu’il faut le faire passer du début à la fin. En ce qui me concerne, cela a été pour moi une difficulté supplémentaire. Et puis avec des copains derrière la vitre lors de l’enregistrement, ce n’est pas le public le plus facile. Je dirais même que c’est le plus exigeant.
Propos recueillis par David RAYNAL
Tri Yann – La Belle Enchantée – Marzelle- Coop Breizh
Tri Yann, le site officiel : http://triyann1.wixsite.com/triyann
Tri Yann, le site officiel : http://triyann1.wixsite.com/triyann
Les prochaines dates de concert :
- Mardi 4 et mercredi 5 octobre 2016 : Le concert des 45 ans, Paris (75) - L'Alhambra
- Samedi 29 octobre 2016 : Lorette (42) - l¹Écluse à 20h30
- Dimanche 30 octobre 2016 : Pierrefontaine-les -Varans (25) - « Les Celtivales »
- Samedi 19 novembre 2016 : Moëlan-sur-Mer(29)
2017 :
- Samedi 14 janvier : Nogent (52) - Centre Culturel Robert Henry à 20h30
- Samedi 28 janvier : Limay (78) - Salle Municipale à 20h30
- Samedi 18 mars : Porcieu (38) -Salle des Marinières à 21h15
- Samedi 22 avril : Réaumur (85)
- Mardi 4 et mercredi 5 octobre 2016 : Le concert des 45 ans, Paris (75) - L'Alhambra
- Samedi 29 octobre 2016 : Lorette (42) - l¹Écluse à 20h30
- Dimanche 30 octobre 2016 : Pierrefontaine-les -Varans (25) - « Les Celtivales »
- Samedi 19 novembre 2016 : Moëlan-sur-Mer(29)
2017 :
- Samedi 14 janvier : Nogent (52) - Centre Culturel Robert Henry à 20h30
- Samedi 28 janvier : Limay (78) - Salle Municipale à 20h30
- Samedi 18 mars : Porcieu (38) -Salle des Marinières à 21h15
- Samedi 22 avril : Réaumur (85)