Tourisme marocain : Un levier essentiel pour l'emploi

Avec mobilisation accrue des territoires


Zoubir Bouhoute

Le tourisme marocain enregistre des performances exceptionnelles, dépassant largement les niveaux atteints avant la pandémie. Les 8 premiers mois de 2024 se sont distingués par une augmentation à deux chiffres des arrivées internationales, démontrant le retour en force du Maroc sur la scène mondiale.



En parallèle, les recettes en devises continuent de grimper, atteignant des niveaux jamais vus auparavant. Cette dynamique témoigne de la résilience du secteur du tourisme et de la pertinence de la feuille de route élaborée dans le cadre du partenariat public-privé, qui a joué un rôle central dans la relance du secteur.

Ce plan stratégique, mis en place après les chocs successifs de la crise sanitaire, a permis non seulement d’attirer davantage de touristes, mais aussi de garantir des emplois à des centaines de milliers de professionnels du secteur. Hôteliers, restaurateurs, agents de voyages, transporteurs touristiques et guides touristiques bénéficient directement de cette reprise économique, qui redonne vie à des régions entières. Les mesures incitatives du programme Go Syaha*, de la Charte d’Investissement et de Cap hospitalité ont également offert de nouvelles opportunités aux investisseurs.

Cependant, malgré les résultats positifs, les autorités marocaines se doivent de maintenir la cadence et d’intensifier leur soutien. Le besoin de renforcer la connectivité, notamment par l'augmentation des liaisons aériennes, est primordial pour permettre au Royaume de capter une part encore plus importante du marché mondial. De plus, la promotion des destinations moins fréquentées et le développement de nouveaux produits touristiques devraient rester des priorités pour élargir l’offre et attirer une clientèle plus diversifiée.

L'un des éléments clés pour pérenniser cette dynamique repose sur la concrétisation des projets structurants prévus dans la nouvelle feuille de route du tourisme. Ces projets nécessitent une implication active des régions, en mobilisant les mécanismes de soutien et en facilitant l'accès au foncier à vocation touristique. Le renforcement de ces partenariats régionaux est indispensable pour stimuler le développement local et l’essor du tourisme dans des zones moins desservies. De plus, l'amélioration des infrastructures, la création de pôles touristiques régionaux et la valorisation des spécificités locales doivent être au cœur de la stratégie pour garantir un tourisme durable et inclusif. Les régions, grâce à un soutien financier adéquat et une gouvernance décentralisée, ont un rôle crucial à jouer dans cette montée en puissance du secteur.

Par ailleurs, le défi majeur du secteur réside dans l'amélioration des taux d'occupation hôtelière, qui restent en deçà du potentiel réel du pays. Si certaines destinations comme Marrakech ou Agadir affichent des taux impressionnants, d'autres régions peinent encore à séduire les visiteurs. Une stratégie de promotion plus ciblée, combinée à un soutien accru aux petites et moyennes entreprises du tourisme, pourrait permettre de remédier à ces disparités et de dynamiser les zones sous-exploitées.

Aussi, la création d'emplois dans le secteur du tourisme représente un levier essentiel pour répondre rapidement à la crise du chômage, qui a atteint des niveaux alarmants au Maroc. Le tourisme a la capacité de générer des emplois à court terme, mais pour exploiter pleinement ce potentiel, il est primordial  de renforcer la connectivité, intensifier la promotion des destinations et adapter les mécanismes de soutien aux investissements intermédiaires. Actuellement, le plafond de 10 millions de dirhams pour le programme Go Syaha et le minimum de 50 millions de la Charte d'Investissement laissent de côté les projets situés entre ces deux seuils, alors qu'ils pourraient jouer un rôle clé dans la création massive d'emplois. Un ajustement de ces dispositifs permettrait d'attirer davantage d'investissements, de stimuler la croissance du secteur et d'accélérer la résorption du chômage.
 

En effet , selon le wali de Bank Al Maghrib, le chômage des jeunes au Maroc continue de susciter de vives préoccupations avec une nouvelle aggravation des taux de chômage parmi cette catégorie, particulièrement en milieu rural, où le taux a grimpé de 46,1 % à 48,8 % au deuxième trimestre 2024. En milieu urbain, il a également augmenté, passant de 33,6 % à 36,1 %. D’un autre coté la menace de perte d'emplois dans le tourisme côtier marocain, qui représente environ 30% du secteur touristique national et emploie plus de 300 000 personnes, est alarmante selon un rapport de la Banque mondiale. Celui-ci prévoit une réduction de 32% des emplois d'ici 2035, affectant particulièrement des régions comme Agadir, Tanger-Tétouan et Casablanca. La baisse attendue des dépenses touristiques, estimée entre 8 et 18%, pourrait lourdement impacter des secteurs clés tels que l'hôtellerie, la restauration et l'approvisionnement alimentaire, fragilisant ainsi les petites entreprises et touchant de manière disproportionnée les femmes. Face à ces risques, le rapport souligne l'urgence d'une transition vers un tourisme durable et d'infrastructures résilientes afin d'éviter une contraction du secteur, menaçant l'économie locale et le bien-être de milliers de travailleurs.

Le Maroc dispose de tous les atouts pour devenir l'une des premières destinations touristiques mondiales. Les performances actuelles, bien que spectaculaires, ne sont qu'un aperçu du potentiel à venir. Une stratégie d'investissement plus inclusive, accompagnée d'un soutien continu au développement des infrastructures et à la promotion du pays, permettra de consolider ces acquis et de propulser le tourisme marocain vers de nouveaux sommets.

Go Siyaha est un programme destiné à soutenir les investissements dans le secteur du tourisme

 
Mercredi 2 Octobre 2024
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