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123 skippers prêts pour une bonne dose de Rhum !




Port d’attache de la Route du Rhum depuis 40 ans, la cité corsaire de Saint-Malo accueille pour la 11ème fois depuis 1978 les marins en partance pour la Guadeloupe. Ils seront 123 skippers solitaires – un record – sur six classes de bateaux à s’élancer sur l’Atlantique le 4 novembre à 14h00. Pleins feux sur une édition qui se veut déjà celle de tous les superlatifs.



Départ de Saint-Malo - © DR
Départ de Saint-Malo - © DR

Les pontons du bassin Vauban à Saint-Malo - © Alexis Courcoux
Les pontons du bassin Vauban à Saint-Malo - © Alexis Courcoux
Saint-Malo, novembre 1978. J’avance sur les pontons mouvants du bassin Vauban au côté de mon père, dans la brume glaciale et éclairée par des spots qui diffusent une lumière blanche électrique. Pour celui qui n’a jamais barré que des cotres ventrus en bois taillés pour la pêche, la découverte nocturne de la silhouette fuselée de ces géants des mers a de quoi, au sens propre comme au figuré, faire froid dans le dos. En même temps, l’idée que ces 38 marins solitaires traversent l’océan pour aborder dans la nuit tropicale des cieux plus cléments ne peut que forcer l’admiration des deux terriens contraints que nous sommes. J’ai 9 ans et à l’école primaire de Cancale, ville d’où est donné depuis toujours le départ, nous faisons des exposés sur ces drôles d’engins aux noms bizarres, catamaran, trimaran, prao, monocoque, multicoques. A l’époque, les plus grands marins du moment ont répondu présents à l’appel du grand large. Alain Colas, Michel Malinovsky, le canadien Mike Birch, Olivier de Kersauson, Philippe Poupon, et une certaine Florence Arthaud qui allait bientôt faire parler d’elle, s’alignent sur la ligne de départ.

© Alexis Courcoux
© Alexis Courcoux
En cette fin des années soixante-dix, jamais le concept, un homme, un bateau, une course n’a été autant d’actualité. Au large de la pointe du Grouin, le coup de canon qui retentit du bateau de la Marine nationale marque le début d’une grande aventure presque sans sons ni images.  Bien loin des liaisons par téléphone satellite, des images retransmises quotidiennement depuis les bateaux sur les réseaux sociaux pour abreuver les fans et les médias, des applications mobiles pour suivre toute l’actualité de la course en temps réel ou des régates virtuelles pour se mesurer aux skippers, un silence radio assourdissant, source d’angoisse et d’attente pour le public et les proches, s’abat soudainement sur la flotte des solitaires. Il devait pratiquement perdurer jusqu’à l’arrivée du premier concurrent en Guadeloupe trois semaines plus tard. Pour tous, l’imagination est à la manœuvre. Et il nous faut deviner, la solitude absolue des marins, la violence des tempêtes automnales, les embruns glacés de l’Atlantique Nord, puis la caresse puissante des alizés qui préfigure la chaleur et l’ivresse de l’arrivée à Pointe-à-Pitre. 

© DR
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​Une course sans limite

Maxi Edmond de Rothschild - © DR
Maxi Edmond de Rothschild - © DR
L’histoire de la course commence trois ans plus tôt au printemps 1975, lorsque Bernard Hass alors secrétaire général du Syndicat des producteurs de sucre du rhum des Antilles et Florent de Kersauson (frère cadet d'Olivier de Kersauson) se retrouvent pour un déjeuner à Paris. Désireux de redorer le blason d’une île récemment frappée par l’éruption du volcan de la Soufrière et de relancer la filière du rhum, les deux hommes décident de lancer une course à la voile dont la destination finale sera bien sûr les Antilles. Ils vont alors voir le publicitaire Michel Etevenon qui s'occupe de gérer l'Olympia et le budget de Kriter, alors sponsor d'Olivier de Kersauson. Imaginé par Michel Etévenon, le parcours visionnaire de la Route du Rhum (dépressions atlantiques, calmes anticycloniques, euphorie des alizés) allait d’emblée déchainer les passions. 

© Alexis Courcoux
© Alexis Courcoux
L’idée du concept de cette course lui est justement venue quand les organisateurs de l’OSTAR, la fameuse Transat anglaise décidèrent, pour des raisons de sécurité, mais aussi pour contrer les récentes victoires françaises, de changer les règles du jeu en limitant la taille des bateaux. Michel Etévenon saisira cette opportunité pour lancer une transatlantique en France, ouverte à tous les navires, sans limite de jauge. Lors de cette première édition désormais mythique, ce ne fut pas un catamaran, mais un trimaran qui mit, pour toujours sur cette épreuve, un terme à la suprématie des orgueilleux monocoques. La petite araignée jaune du Canadien Mike Birch (Olympus Photo) allait, avec seulement 98 secondes d’avance, damer le pion au long cigare effilé de Michel Malinovski (Kriter V) cette année mené par le navigateur malouin Bob Escoffier. Une légende était née malgré la disparition tragique d’Alain Colas sur Manuréva et de Loïck Caradec sur Royale II huit ans plus tard. Celle de la « Reine » des transatlantiques et de ces générations spontanées de marins solitaires, Poupon, Arthaud, Bourgnon, Peyron, MacArthur, Desjoyaux, Coville, Lemonchois, Gabart et Jourdain.


Temps de course divisé par quatre

Arrivée à la Guadeloupe
Arrivée à la Guadeloupe
Onze éditions et quarante ans plus tard, c’est le vainqueur de la dernière édition sur Banque Populaire qui embarque sur Happy, le sister-ship d’Olympus Photo vainqueur de la première transatlantique pour ce qu’il appelle « sa dernière rasade de rhum ».  Il faut dire qu’en quatre décennies, le temps de course a tout simplement été divisé par plus de trois, passant de 23j 06h 59’ 35’’ avec Mike Birch en 1978, à 7j 15h 08’ 32’ lors de la dernière édition avec Loïck Peyron. « Finir le Rhum comme ça, de la manière la plus lente qui soit et en régate sur un bateau symbolique, cela boucle 40 ans de course au large. J’étais au départ de la première édition mais je ne l’ai pas faite. J’avais 18 ans et je suis cette année sur la ligne de départ, donc ça va » explique à Philippe Eliès  pour le guide officiel, le Baulois au palmarès exceptionnel qui avait remplacé il y a quatre ans au pied levé Armel Le Cleac’h alors blessé à la main sur son maxi-trimaran de 33 mètres. Le sel du Rhum, c’est enfin d’avoir su mélanger des individualités aux trajectoires diverses. D’un côté des marins professionnels, Francis Joyon, François Gabart, Jérémie Beyou, Sébastien Josse, Samantha Davies, Alex Thomson, Louis Burton, Yann Eliès, avec leur cortège de sponsors et d’innovations techniques, de l’autre, des amateurs éclairés, l’homme d’affaires Christian Guyader, l’ex-capitaine de la Bisquine de Cancale Florian Gueguen, lé gérant d'une société de Télécom Emmanuel Hamez ou le directeur administratif et financier Maxime Cauwe qui s’élancent pour réaliser leur projet fou en solitaire sur la même ligne de départ. Avec pour tous, l’ambition d’arriver entier et pourquoi pas en tête de leur classe dans la chaleur moite de Pointe-à-Pitre.

© DR
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Pour suivre la course sur le site officiel : https://www.routedurhum.com/fr
Site de la ville de Saint-Malo : http://www.ville-saint-malo.fr
Office de tourisme : https://www.st-malo.com
Les îles de la Guadeloupe : http://www.lesilesdeguadeloupe.com/tourisme/fr-fr

A lire sur le sujet :
Comme de nombreux coureurs au large ou plaisanciers passionnés, Catherine Chabaud a longtemps rêvé de s’élancer de Saint-Malo à Pointe-à-Pitre, avant de réunir les conditions du grand départ. À l’occasion des 40 ans de la Route du Rhum, la navigatrice partage cette fois le rêve d’un futur concurrent… Avec la complicité de Julie Bourgois, elle revient sur ses émotions du large, exhume les parfums des embruns, de la passion, du suspense, de la fraternité, de la peur, du bonheur… tous les parfums du Rhum.

Parfums de Rhum
Catherine Chabaud- Julie Bourgois
Glénat
208 pages
Prix : 15.95 €

 
Jeudi 1 Novembre 2018
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